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Changement de régime matrimonial et dissimulation de l’existence des enfants
Publié le :
14/03/2022
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Par défaut de choix préalablement à la célébration du mariage, et notamment par conclusion d’un contrat de mariage devant notaire, les époux sont automatiquement soumis au régime de la communauté réduite aux acquêts, qui leur permet de conserver leurs biens personnels acquis avant le mariage, et de constituer un patrimoine commun par les biens obtenus durant le mariage.
La modification de ce régime en cours d’union reste possible, mais ne doit pas aller à l’encontre des intérêts de la famille, notamment des enfants qui, lorsqu’ils sont majeurs, bénéficient d’un droit d’opposition.
Dans une récente décision, la Cour de cassation s’est prononcée quant à la régularité d’une telle modification, en présence d’enfants d’un premier lit.
Dans les faits en question, des époux mariés sans contrat préalable conviennent en cours d’union, de la signature d'une convention afin d’opter pour le régime de la séparation des biens. Cette convention est homologuée plus de six mois après.
Au décès de l'époux laissant pour lui succéder son épouse ainsi que deux enfants nés d’une union précédente, ces derniers assignent la veuve en nullité pour fraude de la convention de modification du régime matrimonial, au motif que la convention indiquait expressément que les époux n’avaient pas d’enfants, ce qui était incontestablement inexact.
Le litige est porté devant la Cour d’appel qui décide que la convention homologuée n’encoure pas la nullité, faute pour les enfants d’apporter la preuve de la fraude de la privation de leurs droits successoraux.
Les enfants se pourvoient en cassation et soutiennent que la modification du régime matrimonial des époux par l’option du régime de la séparation de bien provoquant l’appauvrissement de l’un des époux au profit de la constitution, par l’autre, d’un patrimoine immobilier propre. En appui à leur demande, les demandeurs soulèvent le constat selon lequel le patrimoine immobilier de l’épouse résultait de l’achat successif de biens dont elle était propriétaire, mais dont le financement avait été permis par le remploi de fonds propres, alors que les charges du mariage avait été assumées par la pension de retraite de leur père. Ainsi, le défunt s’était appauvri en réglant les charges du mariage pour que son épouse se constitue un patrimoine immobilier, lésant ainsi les héritiers par un mécanisme frauduleux visant à ne pas mentionner les enfants dans la convention de modification du régime matrimonial.
La Cour de cassation rejette leur pourvoi et rappelle que « la dissimulation de l’existence des enfants d’un des époux lors de l’adoption d’un régime de séparation de biens, qui n’induit aucun avantage pour l’un ou l’autre des époux, n’est pas en elle-même constitutive d’une fraude ». En l’espèce, elle ajoute que cette omission peut simplement relever d’une négligence, mais ne manifeste pas obligatoirement une volonté de tromper ou de nuire. Or, dans la requête en homologation de la convention de modification de régime matrimonial, la mention relative aux enfants pouvait être comprise en le sens que les époux n’avaient pas d’enfants communs.
En ce qu’elle ne comportait aucune clause susceptible de nuire aux héritiers, la convention litigieuse ne pouvait pas être déclarée nulle, faute de preuve.
Le défaut de preuve est également constaté par la Haute juridiction, qui confirme l’analyse faite de la Cour d’appel, quant au fait qu’à la date du changement de régime matrimonial, le patrimoine du père en instance de préretraite se réduisait à des liquidités dont il avait la libre disposition et son épouse encore en activité salariée, était en mesure de justifier que l’achat du patrimoine immobilier avait été réalisé par réemploi du prix de vente de biens précédents, associés à divers apports ou emprunts personnels.
Une telle solution semble critiquable au regard de l’article 1397 alinéa 2, qui fait expressément mention, en cas de modification du régime matrimonial, du devoir d’information obligatoire auprès des enfants majeurs de chaque époux.
Même nés d’une précédente union, les enfants du défunt auraient dû, semble-t-il, être informés de la conclusion d'une telle convention, afin de bénéficier du délai d’opposition de trois mois.
Ici la Cour de cassation se borne à retenir l’emploi fait par les époux de leurs patrimoines pour relever de l’existence ou non d’une fraude leur portant préjudice.
Référence de l’arrêt : Cass. civ 1ère 26 janvier 2022 n°20-18.726
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